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14 novembre 2010 7 14 /11 /novembre /2010 06:00

 SUHAYL IBN AMR radhiallahuanhu

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http://al-muslimah.actifforum.com/users/2813/78/63/76/smiles/351680.png

 

« Ô 'Umar, peut-être que Suhayl prendra demain une position qui te réjouira.»

[ Parole du Prophète Muhammad Salla-llah allahi wa salam , rapportée par Ibn Asâkir d'après le récit de 'Ubaydallah Ibn 'Umayr.]

 

C'était un ennemi acharné et irréductible du Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam et de l'islam. Il avait mis ses dons de tribun et de poète au service de la propagande qurayshite dirigée contre le Prophète Salla-llah allahi wa salam.

 

Son redoutable sens de la diplomatie et sa réputation de fin négociateur furent utilisés par Quraysh lorsqu'il fallait ouvrir des négociations avec le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam. Et c'est ainsi que son nom allait se confondre dans l'histoire avec le traité d'Al-Hudaybiya signé entre le Prophète Salla-llah allahi wa salam et la tribu de Quraysh en l'an six de l'Hégire.

Ce jour-là, Suhayl fit preuve d'une intransigeance excessive en refusant que soit mentionné sur le parchemin du traité le terme de « Clément », qualifiant Dieu, et celui de Messager de Dieu, qualifiant le Prophète Salla-llah allahi wa salam, en dépit des protestations des compagnons.

Mais le Messager de Dieu savait ce que ses compagnons ignoraient. Et c'est ainsi que le traité d'Al-Hudaybiya s'avérera être un vrai succès diplomatique pour la cause de l'islam.

Il en va de même pour Suhayl à qui beaucoup de compagnons en voulaient pour son hostilité contre l'islam mais que le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam ménagea pour des raisons que lui seul connaissait.

 

En effet, lors de la bataille de Badr, Suhayl Ibn 'Amr radhiallahuanhu fut fait prisonnier par les musulmans avec d'autres qurayshites. 'Umar radhiallahuanhu qui lui en voulait terriblement, s'approcha du Prophète Salla-llah allahi wa salam et lui dit :

« Ô Messager de Dieu ! Laisse-moi arracher les incisives à Suhayl pour qu'il ne puisse plus dénigrer. »

L'Envoyé de Dieu Salla-llah allahi wa salam lui répondit :

« Ô 'Umar, je n'ai pas le droit de mutiler quiconque afin que Dieu ne me mutile pas, bien que je sois prophète. »

Puis, il fit à 'Umar radhiallahuanhu  cette confidence :

« Ô 'Umar, peut-être que Suhayl prendra demain une position qui te réjouira…»

 

Là aussi, l'observation du Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam s'avérera vraie… Le plus grand tribun de Quraysh, son plus fin diplomate, devint un des plus acharnés défenseurs de l'islam qu'il avait tant combattu. Et cette heureuse métamorphose ne fut possible que grâce à la grandeur d'âme et la magnanimité dont fit preuve le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam lors de son entrée à la Mecque.

C'est en l'an huit de l'Hégire, en effet, que le Prophète Salla-llah allahi wa salam, à la tête de quelques dix mille musulmans, marcha sur la Mecque d'où il avait été expulsé avec ses compagnons huit ans auparavant. Jamais la Mecque et ses environs n'avaient vu un tel monde discipliné scandant l'unicité de Dieu.

L'islam, qui ne comptait qu'un nombre restreint d'hommes et de femmes obligés de se cacher pour adorer Dieu était maintenant au fait de sa gloire et de sa puissance. La Mecque, voyant que toute résistance était vaine, ouvrit ses portes et retint son souffle. Qu'allait faire d'elle le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam après qu'elle l'eût traité d'imposteur, torturé et persécuté ses compagnons jusqu'à ce qu'elle les ait chassés de leur terre natale ?

 Et c'est ainsi que la crainte de la vengeance pour les torts subis par les musulmans s'installa dans les coeurs des qurayshites. Suhayl Ibn 'Amr radhiallahuanhu était de ceux qui avaient cette impression. Laissons-le nous raconter lui-même ce qu'il avait ressenti ce jour-là :

« Lorsque le Messager d'Allah entra à la Mecque, je me suis réfugié chez moi et me suis barricadé. Ensuite, j'ai envoyé mon fils 'Abdallah demander au Prophète de m'accorder l'amân (protection) et le pardon car je craignais pour ma vie. 'Abdallah alla voir le Messager et lui dit : ” Ô Envoyé de Dieu ! Mon père demande de l'amân. Peux-tu le lui accorder ?”

Il lui répondit : « Oui, il a l'aman de Dieu, qu'il sorte sans crainte. »

Ensuite, l'Envoyé de Dieu Salla-llah allahi wa salam s'adressa à ceux qui l'entouraient et leur dit : « Quiconque parmi vous aperçoit Suhayl, qu'il évite de lui montrer de l'hostilité, car celui-ci est un homme raisonnable et noble et ce n'est pas quelqu'un comme lui qui peut ignorer l'islam. Aucune force ne peut empêcher les desseins de Dieu de s'accomplir…»

Abdallah courut annoncer la bonne nouvelle à son père. Celui-ci s'écria alors :

« Par Dieu, il a été magnanime !»

Le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam reçut ensuite les habitants de la Mecque inquiets quant à leur sort, et leur dit : « Ô peuple de Quraysh, qu'attendez-vous de moi ? »

Suhayl, qui venait de recevoir le pardon du Prophète Salla-llah allahi wa salam, s'approcha et parla au nom des Quraysh.

Il dit : « Nous n'attendons que le bien. Tu es un frère généreux, fils d'un frère généreux…»

Le visage éclairé par un large sourire, le Messager Salla-llah allahi wa salam les regarda avec affection puis leur dit :

« Allez, vous êtes libres ! »

 

Depuis ce jour-là, Suhayl radhiallahuanhu ne sera plus le même homme. Ces paroles l'avaient troublé, bousculé et profondément bouleversé. Il pensa et repensa au cas de Muhammad Salla-llah allahi wa salam et n' arrivait pas à admettre qu'un tel homme aux qualités spirituelles et morales indéniables fût un imposteur.

Le Messager Salla-llah allahi wa salam a dit vrai :

« Un homme raisonnable et noble ne peut ignorer l'islam… »

Et c'est ainsi, graduellement, que son coeur s'ouvrit à la lumière de l'islam, ce qui est admirable pour cet homme qui ne s'est pas converti par peur ou par contrainte, mais après une longue réflexion sur le Prophète et son message.

On rapporte que le jour de la bataille de Hunayn, il n'était pas encore musulman, et ce n'est que plus tard qu'il embrassa l'islam à Al-Ja'rana, près de la Mecque. Et là, il devint un musulman fervent et convaincu qui se surpassa pour faire oublier son passé.

Abû Bakr radhiallahuanhu rapportera ce qui suit :

« J'ai vu Suhayl Ibn 'Amr le jour du pèlerinage d'adieu, offrant au Messager de Dieu une bête qu'il sacrifia de sa main.
Ensuite, ce dernier se fit couper les cheveux et je vis Suhayl les prendre et les mettre sur ses yeux.
Je me rappelai alors le refus de Suhayl d'écrire “Au nom de Dieu, Clément et Miséricordieux”
et “Muhammad, Messager de Dieu” et je remerciai Dieu de l'avoir guidé… »

 

Ses contemporains ont tous témoigné de sa piété, de ses penchants pour la prière et le jeûne, de sa crainte révérencielle de Dieu et de sa passion pour le Saint Coran, qu'il entreprenait d'apprendre avec beaucoup d'efforts. Quant à ses dons de tribun et de diplomate, il les mettra désormais au service de l'islam, seulement de l'islam.

C'est ainsi qu'il prendra une position historique à la mort du Messager Salla-llah allahi wa salam ; position qui redonnera à la communauté sa cohésion et sa stabilité après que celle-ci eût connu des moments de flottement et de panique, aussi bien à Médine qu' à la Mecque.

Si, à Médine, Abû Bakr radhiallahuanhu a su par sa grande sagesse remettre les choses dans l'ordre, à la Mecque, ce fut notre illustre compagnon Suhayl qui joua ce rôle décisif. Il rassembla les musulmans désorientés par la mort du Prophète Salla-llah allahi wa salam et leur tint un discours admirable qui leur rendit leur sérénité et leur stabilité.

Il leur dit que Muhammad Salla-llah allahi wa salam était un vrai messager et que sa mission était authentique, car ce n'est qu'après l' avoir accomplie qu'il rendit l'âme. Maintenant qu'il est mort, ajouta-t-il son message est toujours là et leur devoir à eux est de suivre ce message et d'être fidèles à ses enseignements. Et c'est là que s'accomplira la prédiction du Prophète Salla-llah allahi wa salam disant à 'Umar :

« Ô 'Umar. peut-être que Suhayl prendra demain une position qui te réjouira !»

 

Et à propos des incisives que 'Umar radhiallahuanhu voulait arracher, « Laisse-les ô 'Umar, peut-être qu'un jour elles te plairont. », 'Umar radhiallahuanhu se remémora cette prédiction et rit longuement. Suhayl radhiallahuanhu était maintenant un des plus ardents défenseurs de l'islam.

 Lorsque les armées musulmanes prirent le chemin menant aux empires romain et perse, Suhayl radhiallahuanhu y prit sa place le plus naturellement du monde, en luttant, cette fois-ci, pour un idéal de salut et de justice pour les peuples asservis et soumis au règne des tyrans.

Le jour de la bataille d'Al-Yarmûk, il fit preuve d'un héroïsme légendaire, trouvant par là l'occasion d'effacer le souvenir de son passé d'ennemi de l'islam. Et il l'effaça aussi courageusement qu'admirablement.

Les armées musulmanes victorieuses revinrent à leur point de départ, mais Suhayl, lui, refusa d'y revenir en dépit de l'attachement qu'il éprouvait pour sa ville natale.

Un de ses compagnons, Abû Sa`d Ibn Fudhâla qui l'avait accompagné en Syrie rapporte à son sujet ce qui suit : « J'ai entendu Suhayl radhiallahuanhu dire, alors que nous étions en Syrie :

“J'ai entendu le Messager de Dieu Salla-llah allahi wa salam dire : ” Celui qui consacre une heure de sa vie au service de Dieu a plus de mérites que celui qui oeuvre toute sa vie dans sa famille.”

Aussi, je me consacrerai là au service de Dieu et je ne retourne plus à la Mecque.” »

Et c'est dans les environs de la Palestine qu'il mourut, alors qu'il était mobilisé dans la voie de Dieu, prêt à tout moment à lutter pour la défense de l'islam et pour sa gloire.

 

Que Dieu soit satisfait de cet illustre compagnon repentant et plein de résipiscence !

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Tiré du livre les compagnons du Prophète (tome 1)

Les premiers hommes de 'Islam de Messaoud abou Oussama

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20 octobre 2010 3 20 /10 /octobre /2010 06:30

Les anciens sont meilleurs que les contemporains

Le Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) a dit : 

« Les meilleurs des gens sont ceux de ma génération, ensuite ceux qui les suivent et ceux encore qui suivent ces derniers.
Puis il viendra un temps ou des gens attesteront (en témoins) avant qu'on leur demande de le faire. »
 
[1]

 

L'éminent savant SHeikh Sâlih al-Fawzân (qu'Allâh le préserve) a expliqué que les meilleurs de cette communauté sont les compagnons du Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam).

 

Bien plus encore, ils sont les meilleurs des gens de manière générale.

 

Et dans ce hadîth, nous avons ce qui permet de rejeter ceux qui diminuent le rang des compagnons, ou les commandements provenant d'eux, ou ceux encore qui les méprisent de quelque façon que ce soit.

 

Car les compagnons du Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) sont la meilleure des générations.

 

Nous avons dans ce hadîth la preuve du bienfait des trois dernières générations : la génération des compagnons, ceux qui les ont succédés et ceux qui ont succédé à ceux-là.


Car dans ces générations, on y trouve plus de science et de savants.

On trouve bien plus de savants dans ces générations comme les quatre imâms et d'autres encore, tous présents dans ces générations bénites, à qui Allâh a accordé des traces persistantes et une empreinte de véracité dans cette communauté.

 

Dans ces trois dernières générations bénites, nous trouvons beaucoup de science et peu d'innovation. 

 

Et de ce qui était présent en innovation chez eux à leur époque, ils la condamnèrent sévèrement.

Bien plus encore, ils combattaient les prêcheurs de l'innovation et de l'égarement.

A la différence de ceux qui sont venus après eux, qui ne condamnaient que très peu les innovations.

Ceux qui sont venus plus tard après eux ont beaucoup plus d'innovations à leur époque qu'ils ne blâment que très peu, à la différence des générations bénites.

Les gens de l'innovation sont obscurs, discrets, et ils ne laissent pas apparaître leur mal.

 

Dans ce hadîth, nous avons notamment le bienfait des anciens sur les contemporains.

Et chez les anciens, nous avons les meilleures générations, et ils sont considérés comme meilleurs que les contemporains, que ce soit dans la science, les actions, leur voie, leur comportement.

Ceci nous permet de rejeter la parole de ceux qui disent : 
« La voie des anciens mérite le respect. Mais la voie des contemporains est plus savante et connaisseuse des règles. »
 

Le Prophète (sallallahu 'alayhi wa sallam) a fait l'éloge des anciens et a méprisé ceux qui venaient après eux (dans le hadîth).

Et certes, le salut (la réussite) pour ceux qui viennent après est dans le suivi du Prophète par leur biais et leur exemple dans la pratique.

Il n'y a pas de salut dans les contemporains si ce n'est pour ceux qui suivent la voie des anciens et empruntent leur méthodologie.

Et celui qui diverge de leur voie ira à sa perte. Car (comme Ibn Taymiyyah l'a dit) : La voie des anciens est plus savante, connaisseuse des règles et respectable. 
[2]

 

 

Notes

[1]Rapporté par al-Bukhârî et Muslim

[2]Kitâb « I'ânat ul-Moustafîd bi-Charh Kitâb it-Tawhîd » du SHeikh Sâlih al-Fawzân, 2/384
copié de manhajulhaqq.com

Cheikh Salih Bin Fawzan Bin 'Abdillah Al Fawzan

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14 avril 2010 3 14 /04 /avril /2010 08:54

                                    L' hiver c'est le printemps du croyant
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Toutes les louanges appartiennent à Allah, Le Tout miséricordieux, Le Bon, qui de part Sa bonté nous a facilité des périodes pour y accomplir des actes de bien, Il nous y a promis d'énormes récompenses.


Sachez mes frères et mes soeurs que nos pieux prédécesseurs étaient très heureux lorsque l'hiver entrait...


Savez vous pourquoi?


Parce que ils couraient pour tirer profit de cette saison et y gagner l'agréement de leur seigneur ainsi que son paradis.

Comment s'y prenaient ils pour tirer profit de cette saison? Lisez ce qui suit..

Hassan Al Basri a dit :


"Quel bonne saison pour le croyant que l'hiver. Ses nuits sont longues, il prie [durant celles ci]


et ses journées sont courtes, il jeûne [durant celles ci]"


Quand l'hiver venait, 'Ubeyd ibn 'Umayr disait :


"Ô gens du Coran, vos nuits se sont allongées pour vos lectures, lisez donc. Vos journées se sont raccourcies pour votre jeûne, jeûnez donc."


Que le musulman ne laisse donc pas ces périodes de bien lui passer sous le nez et qu'il invoque constamment son seigneur afin qu'Il aide à tirer profit de ces périodes et qu'elles ne lui passent pas sous le nez. Surtout en ce moment où nous nous trouvons, les 10 premiers jours bénis de dhoul hijja.


Yahya ibn Mouhaadh a dit :


"Les nuits sont longues, ne les raccourcis pas par ton sommeil. L'islam est pur, ne l'entache pas par la souillure de tes pêchés."

 

source : fourqane

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15 août 2009 6 15 /08 /août /2009 09:22

                            Abû ‘Ubayda Al-Jarrâh

« Chaque communauté à un garant parmi ses membres. Quand au garant de ma communauté, c’est Abû ‘Ubayda Al-Jarrâh. »

 Parole du Prophète Mohammad (saw) rapportée par Bukhârî et Muslim.

 

C’est grâce à Abû Bakr, dont il était l’ami, qu’Abû ‘Ubayda Ibn Al-Jarrâh est venu à l’Islam. Il fut donc parmi les premiers convertis qui se réunissaient à la maison de Compagnon Al-Arquan au début de la Révélation. Lors de la deuxième émigration en Abyssinie, il fut du nombre de ceux qui partirent chercher protection auprès du Négus sur la recommandation du Messager de Dieu (saw). Mais il ne tarda pas à retourner auprès du Prophète (saw) et à être présent à la journée décisive de Badr. Ce jour-là, notre compagnon fit preuve d’un courage exemplaire et d’une foi surhumaine.

 

Durant la bataille de Uhud, notre compagnon résista aux assauts des qurayshites. Il ne cessait de scruter l’endroit où se trouvait le Messager de Dieu (saw) de peur qu’il ne lui arrive quelque chose de fâcheux. Il se souciait de la vie di Prophète (saw) plus que sa propre vie. Tout à coup, il vit avec effroi une flèche atteindre l’Envoyé de Dieu (saw). Il se dégagea violemment de soldats ennemis qui l’entouraient et courut vers l’endroit où se trouvait le Prophète (saw). Heureusement, ce dernier n’était que blessé. Du sang coulait de son visage béni. L’Envoyé de Dieu essuyait son visage en disant : « comment un peuple pourrait-il prospérer lorsqu’il blesse le visage de son Messager dont le seul tort est de les appeler à leur Seigneur ? » Notre compagnon s’approcha de ce dernier et vit deux mailles provoquait une effusion de sang. Sans perdre un instant, Abû ‘Ubayda s’approcha du visage du Messager de Dieu (saw) et tira avec ses incisives les deux mailles. Il ne réussit pas à les arracher mais il perdit, hélas, ses incisives. L’essentiel pour lui était d’avoir soulagé le Prophète (saw) de ses blessures.

Cet homme exceptionnel par sa foi et son engagement pour l’Islam avait gagné toute la confiance et l’estime du Prophète (saw) à tel point que celui-ci l’avait surnommé « Le garant de la communauté ». Les raisons ayant amené le Prophète (saw) à le surnommer ainsi sont les suivantes : un jour, une délégation de chrétiens de Najrân vint à Médine pour se convertir. A la fin de la cérémonie d’allégeance, les membres de celle-ci dirent au Messager de Dieu (saw) : « Délègue-nous un de tes compagnons pour nous servir de juge. » Le Prophète (saw) leur répondit : « Revenez ce soir et je vous indiquerai l’homme le plus apte à vous servir de juge. » ‘Umar dira alors : « Je partis très tôt à la prière de midi dans l’espoir que je serai la personne à laquelle faisait allusion le Messager de Dieu (saw). A la fin de la prière, le Prophète (saw) se mit à regarder à droite et à gauche comme s’il cherchait quelqu’un. Je me mis alors à lever la tête de façon à attirer son attention, mais il continua à scruter l’assistance jusqu’à ce qu’il vit Abû ‘Ubayda. Il l’appela alors et lui dit : « Vas avec eux et juge leurs différends en toute équité. » Voyant cela, je me suis dit : « Ubayda a eu cette faveur. »

 

C’est dire combien le Messager (saw) estimait et appréciait ce compagnon. Il faut dire aussi que cet homme exceptionnel fut toujours à la hauteur des responsabilités qu’on lui confiait. Un jour, l’Envoyé de Dieu (saw) lui confia le commandement d’une expédition composée de trois  cent hommes afin d’intercepter une caravane appartenant à Quraysh. Ils n’avaient comme provision qu’un sac de dattes et de l’eau. La distance à parcourir était très longue et la route périlleuse, mais Abû ‘Ubayda tenait à remplir cette mission. Comme les provisions étaient limitées, les membres de l’expédition ne mangeait qu’une poignée de dattes chacun. Lorsque celles-ci commencèrent à s’épuiser, ils en arrivèrent à manger une seule datte par jour. Une fois les dattes épuisées, ils furent réduits à ramasser les feuilles des arbres, à les écraser et à les mâcher en les accompagnent d’eau. C’est pour cette raison que cette expédition fut appelée dhât al-khabt (celle des feuilles mortes). La responsabilité de cette mission fit oublier à ‘Ubayda et à ses compagnons les affres de la faim et la fatigue du voyage. Leur seul souci était de mener à terme la mission dont les avait chargés le Prophète (saw).

 

Abû ‘Ubayda fut toujours fidèle à son serment d’allégeance fait au Messager de Dieu (saw) lors de sa conversion à l’Islam. Il fut ainsi de tous les événements et de toutes les batailles où le destin de l’Islam se décidait. Jamais il n’avait failli à son surnom de « garant de la communauté ».

 

Après la mort du Messager de Dieu (saw), ‘Umar Ibn Al-Khattâb voulut prêter serment d’allégeance à Abû ‘Ubayda, le jour de la fameuse réunion de la Saqîfa, il lui dit : Abaisse ta main que je te prête serment d’allégeance car j’ai entendu le Messager dire : « Chaque communauté a un garant parmi ses membres. Quant au garant de ma communauté, c’est Abû ‘Ubayda.» Et notre compagnon de lui répondre : « Il n’est pas question pour moi de prendre la place d’un homme à qui le Messager de Dieu (saw) avait confié le soin de nous diriger dans les prières, ce qu’il fit jusqu’à la mort du Messager de Dieu (saw). » C’est ainsi qu’il désista au profit d’Abû Bakr en le servant durant tout son califat avec fidélité et loyauté.

 

Il en fut de même avec ‘Umar qui lui confia à plusieurs reprise le commandement des armées musulmanes. Mais notre compagnon ne se laissa jamais griser par le pouvoir et se considéra toujours comme un simple soldat parmi tant d’autres. L’exemple suivant montre à quel point l’humilité de ce compagnon était admirable. En effet, dès son accession au califat, ‘Umar décida de relever Khâlid Ibn Al-walîd du commandement des armées musulmanes en Syrie et de remplacer par Abû ‘Ubayda. Ce dernier, à qui un émissaire du Calife avait remis un message l’informant de cette décision, garda le secret et n’en révéla rien à son chef Khâlid. Il le laissa continuer son commandement sans l’informer de la teneur du message du calife.  Ce n’est qu’une fois les conquêtes terminées, que notre compagnon montra le message du calife à Khâlid. Ce dernier, après l’avoir lu, dit à Abû ‘Ubayda : « Que Dieu te fasse miséricorde ô Abû ‘Ubayda ! Pourquoi ne m’as-tu pas remis cette lettre dès sa réception ? » Abû abayda lui répondit : « Je n’ai pas voulu briser tes offensives victorieuses et puis ce n’est pas le pouvoir ni les biens de ce bas monde qui nous intéressent. Ne sommes-nous pas tous frère en Dieu ? »

 

Après la conquête de Damas, le Calife ‘Umar nomma Abû ‘Ubayda gouverneur de la ville. Celui-ci donnera alors la pleine mesure de ses qualités de justice, d’humilité et de détachement des biens de ce monde que ‘Umar exigeait de ses gouverneurs. Un jour, lors d’une visite à Damas, ‘Umar se rendit chez son gouverneur et vit qu’il n’y avait aucun meuble dans sa demeure à l’exception de son bouclier, de son épée et de sa selle. ‘Umar lui demanda en souriant : « Pourquoi n’achètes-tu pas pour toi-même ce que les gens achètent ? »

 

Abû ‘Ubayda lui répondit : « Ô émir des croyants, cela me donnera envie de faire la sieste ! » En effet, ce compagnon de la première heure ne connaissait jamais le repos. S’il n’était pas en adoration de nuit et de jour, s’il n’était pas au service de ses administrés, il était en campagne pour d’autres conquêtes de l’Islam.

 

Un jour, une terrible peste se propagea en Syrie ou Abû ‘Ubayda était en campagne à la tête des armées musulmanes. De nombreux habitants de Syrie périrent à la suite de cette épidémie. Ceci amena ‘Umar à envoyer un message urgent à Abû ‘Ubayda dans lequel il disait : « Si mon message que voici te parvient la nuit n’attends pas le jour pour me rejoindre. » Abû ‘Ubayda prit connaissance du message puis dit à ses hommes : « J’ai compris les intentions du calife. Il veut préserver ce qui ne peut être préservé. » Ensuite, il répondit en ces termes : « Ô émir des croyants ! J’ai compris combien tu as besoin de moi. Mais je suis dans une armée de musulman et je n’éprouve aucun désir de me préserver de ce qui les atteint. Je ne veux pas les quitter jusqu’à ce que Dieu accomplisse sa volonté à mon égard et à leur égard. Alors de grâce, lorsque ma réponse te parviendra, délie-moi de ta décision et laisse-moi demeurer là où je suis. » En lisant la réponse de son gouverneur, ‘Umar se mit à pleurer. Ceux qui étaient avec lui dirent : «  Est-ce Abû ‘Ubayda qui vient de mourir, » Il leur répondit : « Non, mais il ne va pas tarder à partir. » En effet, la terrible épidémie ne tarda pas à le toucher et il tomba malade. Sentant sa fin proche, il fit réunir ses hommes et leur dit : « Je vous laisse ces recommandations qui vous apporteront le bonheur tant que vous y demeurerez attachés : faites la prière, jeûnez le mois de ramadan, donnez les aumônes, faite le grand et le petit pèlerinage, portez-vous conseil les uns les autres et portez conseil à vos gouvernants. Ne les trompez pas et ne laissez pas la vie d’ici-bas vous séduire. Même si un homme arrive à vivre mille ans, il n’aura pas d’autre échappatoire que de passer par la voie que je m’apprête à emprunter. Que la prière et le salut de Dieu soit sur vous ! » Il se tourna ensuite vers Mu’âdh et lui dit : « Ô Mu’âdh ! Charge-toi de diriger la prière. » Il rendit l’âme quelques instants après.

 

Après la prière des morts, Mu’âdh fera son éloge posthume en ces termes : « Ô hommes ! Vous venez de perdre un être exceptionnel dont je n’ai jamais vu de pareil dans sa piété, sa pureté de cœur, sa soif de l’Au-delà et sa sollicitude envers les gens. Demandez pour lui la miséricorde de Dieu, il vous sera fait miséricorde. »

 

C’est ainsi que, depuis ce jour, repose dans la terre de Jordanie le corps noble et pur d’un juste, d’un homme exceptionnel que le Messager de Dieu (saw) avait qualifié de garant de la communauté.

 


Tirait du livre les compagnons du Prophète (tome 1)

Les premiers hommes de 'Islam

Messaoud abou Oussama

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26 février 2009 4 26 /02 /février /2009 10:04

                                     Salâm, l'affranchi d'Abû Hudayfa

 

 

Salâm l'affranchit de hudayfa était un ancien esclave converti très tôt à l'Islam. Il appartenait à un noble qurashite, Abû Hudayfa Ibn 'Uthba, lui aussi converti, qui l'avait affranchi. On n'appela plus Salâm que sous le nom de "l'affranchi d'Abû Hudayfa".

Avant, Salâm était considéré comme fils adoptif de Hudayfa Ibn Uthba. Une fois le verset révélé abrogeant et interdisant l'adoption, il reprit son nom. Or, comme on ne connaissait pas le nom de son père, on ne le désigna plus que par le nom de Salâm, l'affranchi d'Abû Hudayfa. Quoi qu'il en soit, les deux hommes devenus musulmans devinrent inséparables autant par les liens affectifs qui les unissaient à la suite d'une enfance passée ensemble que par la foi et la piété qui étaient des traits communs aux deux compagnons.

 

C'était là, l’admirable esprit égalitaire de l'Islam qui avait pu réunir deux hommes que tous séparait : l'origine sociale aussi bien que l'esprit de caste. Mais le Coran ne dit-il pas que le plus noble d'entre vous auprès d'Allah est le plus pieux ? C'est ainsi que Salâm devînt une partie intégrante de la famille de 'Uthba qui le compta parmi ses membres. On lui accorda même la main d'un membre de la famille, nommée Fâtima Bint Al-Walîd Ibn 'Utba. C'est dire l'estime et le respect que cet homme admirable suscitait autour de lui.

 

C'est un savant confirmé dans la parole divine et son interprétation. Le Prophète (saw) à dit de lui : " Prenez les sciences du Coran de ces quatre personnes :Abdallah Ibn Mas'ûd, Salâm, l'affranchi d'Abû Hudayfa, Ubay Ibn  Ka'b et Mu'âdh Ibn Jabal."

Après l'établissement des musulmans à Médine, Salâm fut chargé de mener la prière à la mosquée de Qubâ. Il devint ainsi le premier imâm des musulmans après l'émigration. C'est un privilège qui prouve d'une façon incontestable le mérite qu'avait ce compagnon en matière de piété et de savoir.

 

"Un jour, rapporte 'Aïcha, je me suis attardée plus que de coutume à la mosquée. En revenant à la maison, le Messager de Dieu (saw) m'a dit : 'où étais-tu ?' J'ai répondu : 'Nous étions en train d'écouter un de tes compagnons nous réciter le Coran à la mosquée.'Ô Messager de Dieu, je n'ai jamais entendu pareille lecture, ni pareille voix parmi tes compagnons. Il se leva et nous partîmes ensemble à la mosquée. L'Envoyer de Dieu (saw) se mit à écouter puis se tourna vers moi et me dit : 'C'est Salâm l'affranchi d'Abû Hudayfa ! Louange à Dieu qui a mis au sein de ma communauté un homme comme lui.' L'Envoyé de Dieu (saw) savait juger les hommes.

 

Abû Hudayfa ne supportait jamais les injustices, dussent-elles être des plus illustres des musulmans. Sa fameuse querelle verbale avec Khâlid Ibn Walîd en constitue un parfait exemple à ce sujet. On rapporte que lors d'une expédition de musulman dirigée par Khâlid Ibn Walîd, qui fut envoyé par le Messager pour prêcher l'Islam dans les tribus arabes de la péninsule arabique, à la suite d'un regrettable malentendu, Khâlid fut amené à combattre et à tuer des hommes bien que ceux-ci aient annoncé leur conversion à l'Islam. Dès qu'il fut informé de cet événement, le Messager de Dieu (saw) demanda pardon à Dieu en disant : "Mon dieu, je désapprouve ce qu'a fait Khâlid." Parmi les nombreux compagnons qui prirent cette position, il y avait notre illustre Salâm qui, fort de ses connaissances des sources (Coran et sounna), engagea la polémique avec Khâlid en lui reprochant son acte contraire aux principes de l'Islam. Khâlid venait de commettre une grave erreur et Salâm n'était pas homme à laisser faire une injustice sans réagir. D'ailleurs, la première chose que demanda le Messager après ce triste événement, c'est de savoir si quelqu'un avait polémiqué avec le chef de l'expédition en désapprouvant son acte. A Cette réponse, la colère du Prophète (saw) s'apaisa car il savait que tant qu'il y avait des hommes justes au sein de sa communauté, et Salâm en était un, l'injustice et l'erreur ne pouvaient être cautionnées ni admises.

 

 

Après la mort du Messager (saw), salâm resta fidèle au serment et fut de ceux qui luttèrent avec acharnement pour protéger et consolider l’Etat central de Médine menacé par les complots des apostats et les soulèvements des tribus menées par de faux Prophètes. Et ce fut la fameuse journée d’Al-Yamâma. Ce jour là, les musulmans affrontèrent les apostats dans une terrible bataille qui décida du destin de l’Islam. Salâm et son frère en Islam Hudayfa furent parmi les premiers combattants à porter les armes pour la défense de l’Islam. La bataille avait mal commencé pour les musulmans. Les apostats, plus nombreux, attaquèrent avec férocité obligeant les musulmans à ce replié un peu. Mais le chef des armées musulmanes, Khâlid Ibn Al-Walîd, réussit, grâce à son grand génie militaire, à regrouper ses soldats et la bataille continua de plus belle. Et c’est alors que survint, portant l’emblème, avec à ses côtés un autre pieux compagnon, Thâbit Ibn Quays. Haranguant les musulmans pour stimuler davantage, il s’écria : « Ce n’est pas cette façon que l’on combattait avec le Messager (saw). » Joignant le geste à la parole, nos deux compagnons creusèrent un fossé et y entrèrent. Ils luttèrent dans cette position avec acharnement jusqu’à ce qu’ils tombèrent martyrs au champ d’honneur. Salâm continua à haranguer les musulmans en récitant ce verset de la révélation :

« Combien de Prophètes ont combattu, en compagnie de beaucoup de disciple, ceux-ci ne fléchirent pas à cause de ce qui les atteignit dans le sentier de Dieu. Ils ne faiblirent pas et ils ne cédèrent point. Et Dieu aime les endurants. » Coran 3/146

 

Hélas, encerclé de toute part, il ne tarda pas à succomber sous les coups des apostats. Peut importe pour lui de mourir maintenant. Dans un dernier soupir, il demanda des nouvelles de son frère en islam, Hudayfa Ibn ‘Utba, qui combattait lui aussi. On lui répondit qu’il était tombé en martyr. Il demanda qu’on les mette côte à côte pour qu’ils puissent mourir unis comme ils avaient vécu unis. Aussitôt après, il rendit l’âme, le sourire aux lèvres. Ainsi mourut cet homme juste et véridique à propos duquel ‘Umar Ibn Al-Khattâb avait dit, sur le point de mourir : « Si Salâm était encore vivant, c’est à lui que j’aurais confié le commandement. » Comme hommage, on ne pouvait trouver mieux.


tirait du livre : Les conpagnons du Prophète (tome1)

Les premiers hommes de l'Islam

Messaoud Abou Oussama

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25 février 2009 3 25 /02 /février /2009 09:25

                                           ‘Uthmân Ibn Mad’ûn

 

‘Uthmân Ibn Mad’ûn était parmi les tous premiers convertis à l’Islam. D’une nature calme et austère, il avait un penchant marqué pour la vie ascétique. Il abhorrait, depuis sa plus tendre enfance, l’esprit libertin et obscurantiste de ses concitoyens et semblait toujours à la recherche d’une voie susceptible de le mener vers la Vérité. L’élan de son âme vers la révélation coranique fut donc des plus naturels dès lors qu’il avait trouvé la réponse à tous ses questionnements existentiels.

En effet, dès le moment où les lueurs de la Révélation commencèrent à poindre, illuminant les cœurs des chercheurs de Dieu, ‘Uthmân Ibn Mad’ûn n’hésita pas à aller rejoindre le groupe des disciples de Mohammed (saw), les « compagnons » comme il sera d’usage de les appeler. Il deviendra ainsi un des habitués de la demeure  d’Al-Arqam, lieu où le Messager de Dieu (saw) transmettait et expliquait les versets révélés. Comme tous les musulmans faibles et sans défense, il sera la victime des persécutions et des exactions des païens qui s’acharnèrent sur lui. Il fera donc partie de ceux qui émigreront en Abyssinie pour échapper aux persécutions des qurayshites. Il y sera lors de la première et de la deuxième émigration en compagnie de son fils As-sayb. En Abyssinie, il gardera toujours sa foi en l’unicité de Dieu et la mission prophétique de Mohammed (saw). Il restera fidèle au message en qui il avait trouvé paix spirituelle et sérénité.

Et les mois passèrent. ‘Uthmân et ses compagnons d’exil attendaient avec impatience le jour où ils pourraient revenir chez eux. Un jour, une rumeur parvint à nos exilés disant que la Mecque s’était convertie à l’Islam et que les qurayshites avaient fini par se prosterner devant le Dieu unique. Ce fut la joie chez Ibn Mad’ûn et ses compagnons, heureux d’entendre une telle nouvelle. Ils firent leurs adieux à l’accueillante et tolérante Abyssinie et reprirent le chemin du retour. Or, une déception les attendait. La conversion des qurayshites n’était qu’une rumeur sans fondement. La Mecque, du moins une grande partie de sa population, restait hostile au Message du Prophète (saw). Il ne leur restait plus que la vieille pratique arabe du jiwâr, le droit de protection à un homme menacé ou traqué. Celui qui jouissait de ce droit de la part d’un noble était immunisé contre toute poursuite ou violence. Seuls, quelques exilés pouvaient se permettre ce privilège. Ibn Mad’ûn était de ceux-là. Il se mit sous la protection du chef qurayshite Al-Walîd Ibn Al-Mughîra et put, de ce fait, entrer librement à la Mecque. Plus personne ne pouvaient s’en prendre à lui, et il pouvait aller et venir à sa guise dans les rues de la Mecque. Ce n’était pas le cas, par contre, pour les autres croyants qui n’avaient pas eu le bonheur d’être protégés comme lui. Pour eux, les brimades continuèrent comme avant. C’est pourquoi, ne pouvant supporter de voir ses compagnons maltraités alors qu’il jouissait d’une protection, il alla trouver Al-Walîd Ibn Al-Mughîra et lui demanda de lever son immunité. Etonné, ce dernier lui dit : « pourquoi ô fils de mon frère ! Un des hommes de mon clan t’a-t-il fait du tort ? » - « Non, mais la protection de Dieu me suffit et je ne veux pas que quelqu’un d’autre me protège. » Al-Walîd lui dit alors : « Allons à la Ka’ba pour déclarer publiquement que tu n’es plus sous ma protection. » Devant l’oratoire, Al-Walîd déclara solennellement qu’Ibn Mad’ûn n’était plus, selon son désir, sous sa protection. Ibn Mad’ûn en fit de même et déclara qu’il avait demandé lui-même la levée de la protection.

C’était sa façon à lui de partager les souffrances de ses frères. Du jour au lendemain, il se retrouva comme eux, sans défense autre que celle de dieu. Un jour, alors qu’il passait devant une assemblée de qurayshites, il entendit le poète Labîd Ibn Rabî’a réciter des vers. Il s’assit devant eux tandis que Labîd déclamait les vers suivants : « toute chose en dehors de Dieu n’est que vanité. » Ibn Mad’ûn répliqua : « Tu dis vrai. » Labîd reprit : «  Tout bienfait est fait pour ne pas durer. » Ibn Mad’ûn répliqua : « Tu mens car les bienfaits du Paradis sont éternels. » Vexé, Labid se tourna vers ses auditeurs et  leur dit : « Ô peuple de quraysh ! Par Dieu, jamais auparavant un membre de votre assemblée ne se faisait traiter ainsi. Comment acceptez-vous cela ? » Une personne de l’assistance lui répondit : « Celui-là est insolent, il a apostasié notre religion. Ne fais pas attention à lui. »  Uthmân répliqua à l’homme et vice versa jusqu’à ce que la polémique se transforma en dispute. L’homme se leva et donna un coup de poing l’atteignant à l’œil. Al-Walîd Ibn Al-Mughîra qui avait assisté à la scène, dit à Ibn Mad’ûn : « Par Dieu ! Ô fils de mon frère, si ti étais sous ma protection, ton œil n’aurait pas été atteint. » Ce dernier lui dit : « Par Dieu, mon œil sain voudrait bien recevoir ce qu’à reçu l’autre œil pour l’amour de Dieu. Et sois assuré, je suis sous la protection de Celui qui est plus fort et plus puissant que toi. » Ibn Al-Mughîra lui proposa une nouvelle fois de revenir sous sa protection mais il déclina l’offre, confiant en sa foi en Dieu. Son destin et celui de ses frères parmi les faibles et les persécutés ne faisaient qu’un et il ne pouvait en être autrement.

C’est alors qu’eut lieu l’émigration de Médine des exilés d’Abyssinie qui purent échapper ainsi et d’une façon définitive aux persécutions des infidèles de Quraysh. La miséricorde de Dieu n’avait pas de limites. Après les épreuves et les vicissitudes, vint le temps de la quiétude et de la paix. A Médine, les croyants pouvaient se consacrer à l’adoration de Dieu sans craindre les exactions de qui que ce soit.

La vie de ‘Uthmân Ibn Mad’ûn était faite d’adoration passionnée et de renoncement aux plaisirs de ce monde. Il jeûnait le jour et s’absorbait dans les prières la nuit. Sa vie était devenue un hymne continuel à la gloire du Seigneur. Ayant renoncé d’une façon définitive aux attraits de la vie, il ne mangeait que des repas simples et ne portait que des habits en haillons ou en étoffes rugueuses. La vie  n’avait plus d’intérêt pour lui. Un jour, il entra à la mosquée, alors que le Messager de Dieu (saw) s’y trouvait avec un groupe de compagnons. Il portait un habit déchiré qu’il avait rafistolé avec un morceau de fourrure. En le voyant ainsi, le Prophète (saw) eut de la compassion pour lui et ses compagnons se mirent à pleurer. L’Envoyé de Dieu leur dit : « Qu’en êtes-vous du jour où l’un de vous portera le matin un vêtement et le soir un autre, où vous enveloppez vos demeures comme on enveloppe la Ka’ba ? » Les compagnons répondirent : « Nous souhaitons que tout cela se produise, ô Messager de Dieu et que nous soyons dans le bien-être et le confort. » Le Messager de Dieu (saw) leur rétorqua : «  Certes ce jour arrivera mais sachez que la façon dont vous vivez aujourd’hui est préférable à celle que vous vivrez ce jour-là. »

Le renoncement de ‘Uthmân était tel qu’il alla jusqu’à négliger ses devoirs conjugaux. Le Messager l’appela un jour et lui dit : « Ô ‘Uthmân ! Tu as des obligations vis-à-vis de ta femme. C’est ainsi qu’est ma sunna en ce domaine. » Il revint à sa femme, mais continua sa vie de renoncement et d’ascétisme avec plus de rigueur. Car c’était là son tempérament et sa vocation. Le Messager de Dieu (saw) savait cela et lui manifestait un grand amour. Le jour de sa mort, il le pleura tellement que ses larmes inondèrent son visage. Il l’embrassa sur le front en lui disant : « Que Dieu te soit miséricordieux, ô Abû As-sayb ! Tu es parti de ce monde sans qu’il n’ait rien pris de toi, et sans que tu n’aies rien pris de lui. »

Le jour de sa mort, ’Umar dira : « Lorsque ‘Uthmân Ibn Mad’ûn décéda de mort naturelle, il perdit un peu de mon estime dans mon cœur. Je me suis dit : ‘Regardez un peu celui d’entre nous qui était le plus renonçant à ce monde. Voilà qu’il meurt de mort naturelle.’ Mais lorsque le Prophète ‘saw) décéda de mort naturelle et après lui Abû Bakr, je me suis dit : ‘Malheur à toi, les meilleurs d’entre nous meurent de mort naturelle.’ Et il reprit l’estime qu’il avait dans mon cœur. »

‘Umar s’attendait à ce que ‘Uthân meure sur le champ de bataille en martyr.  ‘Uthmân Ibn Mad’ûn, l’ascète, le sage, sera le premier musulman à mourir à Médine. Il sera aussi le premier à être enterré au cimetière d’Al-Baqî’. Que Dieu soit satisfait de lui !

 

Tirait du livre : Les compagnons du Prophète(tome1)

Les premiers homme de l'Islam

Messaoud Abou Oussama

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20 février 2009 5 20 /02 /février /2009 07:38

                                              Khâlid Ibn Saîd

 

Il faisait partie d'une des familles les plus aisées et les plus noble de la Mecque. Son père, Sa'îd Ibn Al-'Âs, était en effet issu de la célèbre tribu qurayshite des 'Abd Manâf. C'est donc au sein d'une grande tente que vit le jour et grandit notre noble illustre compagnon Khâlid Ibn Saîd. Comme tous les jeunes des familles aisées de la Mecque, Kâlid vivait dans l'insouciance matérielle, profitant de la vie et de ses plaisirs. Il faisait la joie de ses parents qui le croyaient et accédaient à toutes ses demandes.

 

Or, depuis quelque temps, Kâlid n'était plus le même homme, joyeux et insouciant. Il semblait préoccupé par quelque chose qui troublait son esprit et l'empêchait de se concentrer sur quoi que ce soit. C'est que la nouvelle de la révélation faite à Mohammed (saw) à la grotte de Hirâ commençait à se propager dans la Mecque pour devenir le sujet de discussion de tous les qurayshites. Kâlid non plus ne pouvait échapper à cette terrible interrogation : Mohammed (saw) était-il sincère ? Comment tous les habitants de la Mecque, il connaissait la sincérité et l'honnêteté de son concitoyen. Tout ce qu'il préférait dans cette vie, c'était la retraite et la solitude dans une grotte des environs de la Mecque appelée Ghâr Hirâ. C'est là qu'il avait l'habitude de se retirer pour méditer des journées entières. C'est là, dira-t-il, que l'Ange Gabriel est venu lui apporter la révélation pour quelle raison mentirait-il, se demandait sans cesse Kâlid, et pour récolter quoi, puisqu'il ne voulait ni de ce monde ni de ses plaisirs ?

Et les questions harcelaient l'esprit de Kâlid durant des jours et des jours jusqu'à ce que la lumière divine pénétrât son coeur. Une nuit, alors qu'il dormait, il fit un rêve étrange. Il s'est vu devant un grand feu au milieu duquel son père voulait le jeter, en le poussant de ses deux mains. Il vit ensuite le Prophète (saw) s'approcher de lui et s'interposer entre lui et le feu en le protégeant de son manteau. Cette vision bouleversa Kâlid qui vit là un signe du destin. Le lendemain matin, il se hâta vers Abû Bakr et lui raconta ce qu'il avait vu en rêve. Ce dernier lui dit : "Ô Kâlid, c'est le bien que je veix pour toi. C'est le Messager de dieu (saw) que tu as vu. Suis-le, car l'Islam te sera une barrière contre le feu."

 

Et cet homme illustre, que la quête de dieu attirait, s'en alla à la recherche du Messager de dieu (saw) pour proclamer sa conversion à l'Islam. A partir de ce jour, une métamorphose totale s'opéra en lui. Kâlid devint un autre homme. Il venait de découvrir les jouissances que procure la foi, la spiritualité et l'amour de dieu. Il n'allait vivre que pour cette idéal. Il va de soi que sa conversion ne resta pas secrète. Son père, mis au courant, l'appela et l'interrogea en ces termes : "Est-ce vrai que tu vient de rejoindre Mohammed (saw) qui ne cesse de dire du mal de nos divinités ?"

 

Notre illustre compagnon répondit : "Oui, je l'ai rejoint et j'ai cru en lui, par Dieu, il est sincère et ce qu'il dit est vrai !" Excédé, son père le frappa durement puis l'emprisonna dans une pièce et le soumit au supplice de la soif. Mais rien n'y fit, et notre glorieux compagnon ne cessait de répéter comme un leitmotiv : "Par Dieu, il est sincère et je crois en lui." Son père, qu'une telle proclamation mettait hors de lui, l'emmena alors dans le dessert aride de la Mecque et le laissait des heures durant dans la chaleur caniculaire et suffocante sans une goute d'eau ou un coin d'ombre. Les séances de torture alternaient avec les promesses et les tentatives de séduction, mais Kâlid, imperturbable, répondait : "Je n'abandonnerai jamais l'Islam et je mourrai musulman, advienne que pourra !" Alors, désespéré de voir revenir à ses anciennes croyances, son père lui dit : "Va-t-en, ô insolent, par Lât, je te priverai de ressources !" Kâlid lui répondit : "Dieu est le meilleur dispensateur de ressources."

 

Kâlid quitta le luxe et l'opulence de la maison paternelle sans aucun regret, tant il est vrai qu'il savait que sa nouvelle foi exigeait de lui ascétisme et détachement des choses de ce monde. Mais qu'importe. Notre illustre compagnon était prêt à tout abandonner pour préserver sa foi ; les richesses, la vie facile et les honneurs, il n'en a que faire. Son choix était fait. Il sera musulman et advienne que pourra.

 

Lors de la deuxième émigration en Abyssinie, il sera du nombre de ceux qui partiront pour échapper aux persécutions des qurayshites. Il restera là-bas jusqu'à la prise de Khaybar par les musulmans. La société islamique était en train de se constituer doucement mais sûrement. Kâlid y prit sa place et contribua avec ses compétences et ses atouts à leur édification et à leur défense. Certes, il avait regretté de ne pas avoir assisté à la bataille de Badr, mais le Messager de dieu (saw) lui avait dit : " Ne regrette rien, ô Kâlid, car les gens ont eu une seule émigration alors que vous en avez eu deux. Vous êtes partis chez le roi d'Abyssinie et vous êtes revenus auprès de moi."

Le Prophète (saw) l’estimait beaucoup et lui vouait une grande confiance. C’est ainsi qu’il l’envoya comme gouverneur au Yémen d’où il ne revint qu’après la mort du Prophète (saw). C’était lors de l’investiture d’Abû Bakr comme calife. On rapporte que notre illustre compagnon resta plus de trois mois avant de faire allégeance à Abû Bakr. Il semble qu’il ait préféré que le califat soit confié a ‘Ali ou à ‘Uthmân. Quoi qu’il en soit, ceci n’altéra en rien les relatons cordiales et fraternelles avec Abû Bakr qui l’estimait beaucoup. C’est à lui, en effet, qu’il confia le commandement des armées en route vers la Syrie pour combattre les troupes romaines. Cependant, suite à l’intervention de ‘Umar Ibn Al-Khattâb, le commandement lui fut retiré et confié à Shurahbil Ibn Hasna. Khâlid accepta d’être un simple soldat sous le commandement de Shurahbil et n’en tint nullement rancune à ‘Umar. Il continua à l’aimer et à l’estimer jusqu’à sa mort, nous rapporte sa fille Um Khâlid. Avant le départ des armées en Syrie, Abû Bakr fit à Shurahbil les recommandations suivantes :

 

« Observe Khâlid Ibn sa’îd, et sache que tu as des obligations vis-à-vis de lui, comme tu aurais aimé qu’il ait des obligations vis-à-vis de toi, si tu étais à sa place et lui à la tienne. Et tu n’ignores pas la place qu’il occupe parmi les musulmans. Et tu n’ignores pas qu’il était gouverneur du temps du Messager de Dieu (saw). Je lui avais confié, certes, le commandement et je le lui avais retiré. Et il se peut que cela lui soit profitable pour sa foi, car je n’envie jamais quelqu’un pour le pouvoir. Je lui ai laissé la liberté de choisir avec quel commandement il préférait être, et il t’a préféré à son cousin ‘Amar. » En effet, Khâlid avait choisi d’être avec Shurahbil plutôt qu’avec son cousin ‘Amar Ibn Al-‘Âs. Il dit à Abû Bakr : « Mon cousin m’est préférable par la parenté et Shurahbil par la ferveur religieuse. » Et c’est ainsi que notre illustre compagnon accepta de guerroyer comme simple soldat sous le commandement de Shurahbil Ibn Hasna. Durant la terrible bataille de Marj As-Sufr contre les romains, Khâlid s’illustra glorieusement en donnant toute la mesure de sa bravoure et de son aspiration au martyr. De se fait, à la fin de la bataille, on trouva son corps parmi les dizaines de martyrs tombés ce jour-là, dont ses frères ‘Amr et ‘Abbân. Que Dieu soit satisfait d’eux et de tous les compagnons du Messager de Dieu (saw).




Tirait du livre : Les compagnons du Prophète (tome1) Les premiers

hommes de l'Islam. Par Messaoud Abou Oussama

 

 

 

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18 février 2009 3 18 /02 /février /2009 11:26

                                                                               Sa’îd Ibn ‘Amâr

Parmi la foule de mecquois qui assistait au supplice du martyr Al-Khabbâb Ibn’Adiy dans les environs de la Mecque, il y avait un jeune homme, imposant par sa haute taille et sa force physique, qui jouait des coudes pour voir le glorieux Al- Khabbâb subir les tortures et la crucifixion avec courage et dignité. Bien qu’étant encore polythéiste,  Sa’îd Ibn ‘Amâr n’en était pas moins sensible aux manifestations de la Vérité. Et ce jour-là, son âme et son cœur virent dans l’attitude héroïque d’ Al- Khabbâb une manifestations de cette Vérité. Comment pouvait-il en être autrement lorsqu’il voit que cet homme que l’on mène à la mort, songe à faire sa prière dans la sérénité et la quiétude sans se soucier de ce qui va lui arriver ? Comment accepter qu’il se résigne à son sort en refusant catégoriquement que Mohammed (saw) soit à sa place comme le lui suggéraient ses tortionnaires ?

La scène que vécut  Sa’îd Ibn ‘Amâr, ce jour-là, le hanta longtemps après. Il ne pouvait chasser de son esprit l’image d’Al-khabbâb crucifié et le corps lacéré. Mais, plus que cela, le sacrifice d’Al-khabbâb lui appris plusieurs choses. Il lui a appris que la foi en un idéal vrai et sacré mérite qu’on se sacrifie pour elle. Il lui a appris également que la vrai et foi vécue intensément suscite des miracles et des prodiges. Il lui a appris enfin que cet homme -Mohammed (saw)- aimé autant par ses compagnons ne pouvait être un imposteur. Toutes ces choses-là vont le préocuper pendant plusieurs jours. Il ne cessait de penser à cela, et l’image d’ Al- Khabbâb succombant sous les tortures sans renier sa foi, défilait sans cesse devant ses yeux.  Après plusieurs jours de réflexion, le cœur de Sa’îd Ibn ‘Amâr commença à s’ouvrir à la lumière divine. Et c’est solennellement qu’il proclama sa conversion à l’Islam au milieu d’une foule de gens.

Quelque temps après, il émigra à Médine où il fréquentera assidûment le cercle du Messager de dieu. Il participera à la bataille de Khaybar et à d’autres expéditions. D’un tempérament calme et pondéré, il était discret et effacé, ce qui explique qu’il ne soit pas aussi connu que les autres compagnons. Mais ceci n’enlève rien au mérite de cet illustre homme.

Un jour, entrant chez ‘Umar, il l’interpella en ces termes : «  Ô ‘Umar, crains dieu pour les hommes et ne crains pas les hommes pour dieu ! Que tes actes ne contredisent pas tes paroles ! Ô ‘Umar, sois toujours attentif à ceux qui t’ont chargé de cette responsabilité, qu’ils soient ici ou ailleurs ! Aime pour eux ce que tu aime pour toi et pour tes proches, et déteste pour eux ce que tu déteste pout toi et pour tes proches. Fonce lorsque le droit et la justice l’exigent et ne crains pas dans la voie de Dieu les reproches des gens. »

-‘Umar lui rétorqua : « Et qui peut faire toutes ces choses-là, ô Sa’îd ? »

-Il  lui répondit : « Un homme comme toi que Dieu a investi de la responsabilité de la communauté de Mohammed (saw) et qui ne met rien d’autre entre lui et Dieu. »

-‘Umar qui aimait qu’on lui donne des conseils (et qui disait souvent : « Dieu fasse miséricorde à celui qui me montre mes faiblesses. » fut très content d’entendre de tels conseils venant de la part d’un illustre compagnon. C’est alors qu’il lui proposa de gouverner Hims qui était vacant et qui aurait besoin d’un homme de sa stature.

-Mais, contre toute attente, Sa’îd lui répondit : « Je te conjure, ô Umar, ne me mets pas à l’épreuve ! »

-Umar, visiblement vexé, lui rétorqua : « Malheur à vous ! M’avez-vous chargé de la responsabilité du califat en me laissant seul ? » Il ajouta : «  Par Dieu, je ne te laisserai pas te dérober à cette responsabilité ! » Et il insista tant et si bien qu’il finit par le convaincre. Il lui dit : « Veux-tu qu’on te fixe une source de revenus ? »

-Sa’îd répondit : « Pourquoi faire, mon salaire du bayt al-mâl (trésor public) me suffit amplement. »  Et il partit pour Hims en compagnie de son épouse. Quelque temps après, des nobles de Hims vinrent en visite à Médine. ‘Umar, qui les avait reçus, leur demanda de lui établir la liste de tous les nécessiteux de Hims afin de leur venir en aide. Lorsqu’il reçut la liste il fut surpris de voir le nom de Sa’îd Ibn ‘Amâr mentionné. Il demanda des explications et on lui répondit : « Nous avons remarqué qu’il se passait plusieurs jours sans qu’un feu ne soit allumé chez lui. » ‘Umar pleura jusqu’à ce que les larmes mouillent sa barbe. Un gouverneur nécessiteux, cela ne pouvait arriver qu’à un compagnon du Messager de dieu (saw) qui  avait vendu la vie d’ici-bas pour celle de l’Eternité. Le califat prit une somme de mille dinars et la donna à la délégation en leur disant : «Transmettez mon salut à Sa’îd et dites lui :’ voici une somme d’argent qui te permettra de subvenir à tes besoins.’ »

En recevant cet argent, notre pieux compagnon eut une réaction de rejet qui fit accourir son épouse.

-Celle-ci lui demanda : « Qu’y a-t-il ? L’Emir des croyants est-il décédé ? »

-Il lui répondit : « C’est plus grave que cela ! »

-Elle ajouta : « Les musulmans ont-ils perdu une bataille ? »

-Il lui rétorqua : « Non, c’est plus grave que cela ! »

-Elle dit : «Mais qu’est ce qui est plus grave que cela ? »

-Il lui répondit alors : «Ce bas monde vient d’entrer chez moi pour me faire perdre l’au-delà et la tentation s’est installée dans ma demeure ! »

-Ne sachant pas de quoi il parlait, elle lui dit : « débarrasse-toi d’eux ! »

-Il lui dit : « M’aideras-tu dans ma tâche ? »

-Elle répondit : « Oui, bien sûr ! »

-Alors, il sortit l’argent et lui dit : « Je vais le distribuer aux pauvres parmi les gens de Hims. »

Ainsi était cet homme admirable que les attraits de ce bas monde n’ont jamais pu éblouir. Un jour le califat ‘Umar, venu en visite à Hims, reçut les doléances de ses habitants. Certains d’entre eux lui présentèrent une plainte des plus saugrenues contre leur gouverneur Sa’îd Ibn ‘Amâr . Cette plainte se résumait en quatre points :

-Le gouverneur ne se montre à eux que lorsque le jour montre toute sa clarté.

-Il ne répond à personne la nuit.

-Une fois par mois, il disparaît complètement et personne ne le voit.

-De temps à autre, il est sujet à des pertes de connaissance.

Devant cet état de fait, Umar convoqua Sa’îd en se disant : « Ô Dieu, ne me décois pas à son sujet car j’ai une grande confiance en lui…. » Lorsqu’il fut en face de lui, ‘Umar lui dit : « voilà ce que disent les habitants de Hims à ton sujet. Qu’as- tu à dire, ô Sa’îd ? »

-Gêné, mais obligé de dire la vérité, notre pieux compagnon répondit :  «Par Dieu, je ne voulais pas parler de cela, mais puisqu’il le faut, qu’on en parle. Ils disent qu’ils ne te voient que lorsque le jour atteint sa pleine clarté. Bien sûr, puisque ma femme n’ayant pas de domestique, c’est moi-même qui pétris ma farine, la laisse fermenter puis cuis mon pain. Ensuite, je fais mes ablutions pour la prière d’ad-duha –prière surérogatoire du matin- avant de sortir à leur rencontre. »

-‘Umar loua Dieu et lui dit : « Et pour le deuxième reproche ? »

-Sa’îd dit «  Bien que je répugne à le dévoiler, je consacre jour à recevoir les gens et la nuit pour adorer Mon Seigneur. » Il continua : « Quand au fait que je disparais un jour par mois, j’ai déjà dit que je n’avais pas de domestique. Aussi, c’est moi-même qui lave mon seul vêtement. C’est pourquoi j’attends toute la journée jusqu’à ce qu’il sèche pour sortir. Enfin, pour ce qui concerne mes pertes de connaissance, je vais vous en donner la raison. J’étais présent le jour où les qurayshites torturèrent à mort Al-Khabbâb Ibn’Adiy. J’ai vu comment ils lacéraient son corps en lui disant :  «aimes-tu que Mohammed (saw) soit à ta place. » Et lui de répondre : « Non par Dieu, je ne voudrais jamais être en sécurité avec ma famille alors que le Messager de Dieu souffre de la piqûre d’une épine. » A chaque fois que je me souviens de cette scène, et que je prends conscience que je suis pas venu en aide à Al-Khabbâb, j’ai peur du châtiment de Dieu et je perds connaissance. »

-A la fin de ces belles et émouvantes paroles, ‘Umar s’écria : « Je rends grâce à Dieu de ne pas m’avoir déçu ! » Et il entoura Sa’îd de ses bras en l’embrassant sur le front.

Un gouverneur qui se comporte ainsi, ne peut être, comme nous l’avons dit, qu’un homme sorti tout droit de l’école di Prophète (saw), une école où l’on apprend que ce bas monde n’est pas une fin en soi, un but, mais une passerelle vers le vrai monde, la vraie vie, la vie éternelle. Sa’îd était un pur produit de cette école.

Un jour, on lui dit : «  Dépense pour toi et pour ta famille et profite des délices de la vie. » Et lui de répondre : « Non, je ne serai pas en reste des premiers croyants après avoir entendu l’Envoyé de Dieu (saw) dire :’Dieu qu’Il soit glorifié, rassemblera les gens le jour du jugement dernier. C’est alors que les pauvres parmi les croyants viendront d’un pas léger et s’envoleront comme s’envolent les colombes. On leur dira : ‘Attendez d’être jugé.’ Mais eux répondront : ‘Nous n’avons aucun compte à rendre.’ Alors Dieu dira : ‘Mes serviteurs ont raison.’ Et ils franchiront les portes du paradis…. »

C’est en l’an vingt de l’hégire que cet illustre compagnon rendit son âme à Dieu. Il avait attendu longtemps pour pouvoir rejoindre le bien-aimé Prophète (saw) et les compagnons qui l’avaient précédé. Qu’il se réjouisse maintenant de leur compagnie pour l’éternité !

 

Tirait du livre : les compagnons du Prophète (Tome1) Les premiers hommes de l’Islam par Messaoud Abou Oussama.                             

 

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